Dr ALEXANDRA FOURCADE – DGOS
2011 a été déclarée par la ministre de la santé, année des patients et de leurs droits. Près de dix ans après la promulgation de la loi du 4 Mars 2002, dite « loi des malades », cette initiative avait pour objectifs de dresser un bilan sur l’effectivité des droits et d’analyser les conséquences des nouveaux modes d’organisation des soins (télémédecine, exercice regroupé de la médecine) sur les relations médecins/malades.
Premier constat : les droits des patients sont encore insuffisamment lisibles de nos concitoyens. Deux sondages le confirment, l’un auprès du grand public, le second auprès des professionnels de santé.
70 % des interviewés du sondage grand public répondent par la négative à la question « globalement, avez-vous le sentiment de savoir quels sont les droits des patients ? » et 44% pensent qu’ils doivent obligatoirement demander l’autorisation de leur médecin pour accéder à leur dossier médical.
Ils ne connaissent pas non plus les interlocuteurs pouvant les assister dans l’exercice de leurs droits : 66% déclarent ne pas savoir à qui s’adresser en cas de mauvaises conditions de séjour ou d’un accident médical à l’occasion d’une hospitalisation. Enfin, lorsque les Français sont interrogés sur les droits « nouveaux » qu’ils souhaiteraient voir accordés, ils citent des droits déjà existants.
Les professionnels de santé eux, se déclarent globalement favorables à la formalisation et à la mise en avant des droits des patients. Cette évolution est perçue comme « naturelle » au regard des exigences de la société en matière d’information en général, et pouvant rééquilibrer la relation entre médecin et malade.
Toutefois, certains d’entre eux évoquent des risques dans l’application de nouveaux droits : dégradation de la relation avec les patients, remise en cause progressive de leur statut… D’une manière générale, l’enquête fait état d’une réticence à modifier des pratiques ancrées depuis longtemps et surtout des limites dans la mise en œuvre de ces droits dans la pratique quotidienne (manque de temps, formation inadaptée….).
A partir de ce constat et des propositions remises par les rapporteurs du dispositif « 2011, année des patients et de leurs droits », quatre axes stratégiques ont été retenus par la ministre pour les actions à engager à partir de 2012.
Premier d’entre eux : impliquer les professionnels de santé dans la promotion des droits des patients. C’est évidemment dans le cadre de la relation individuelle entre un médecin et un malade que se joue l’essentiel des avancées dans le domaine des droits des malades. Tendre vers des relations de soins plus réciproques, où le patient est amené à jouer un rôle plus actif – éducation thérapeutique, télémédecine par exemple – est une évolution indispensable. Elle ne va pas pour autant de soi et devra être soutenue, notamment dans le cadre de la formation initiale des jeunes médecins.
Deuxième axe : accompagner le développement des innovations en matière d’organisation des soins et des nouvelles technologies. Cela passe par une vigilance accrue sur la question du recueil consentement et du partage des informations médicales. Aujourd’hui, les patients font confiance à notre système de santé et aux professionnels qui les prennent en charge : il faut maintenir ce capital confiance en renforçant l’information préalable des patients.
Troisième axe : promouvoir la transparence de l’offre de santé. La loi du 9 août 2004 a instauré un parcours de soins mais le patient peine encore à s’orienter. Il manque d’éléments pour choisir de manière éclairée le professionnel ou la structure de soins auquel il pourrait avoir recours. L’objectif est de mettre en place une sorte de « GPS santé » qui contribuerait utilement à la qualité des soins et limiterait les abus tarifaires.
Dernier axe, dynamiser la démocratie sanitaire. L’implication des usagers du système de santé est un exercice démocratique incontournable. Pour autant, il convient d’accompagner ce mouvement en le structurant et en lui donnant les moyens de son action. Le renouvellement en juin dernier de la conférence nationale de santé y contribue, de même les nombreux dispositifs de concertation mis en place par la loi HPST au niveau régional.
Plusieurs initiatives ont d’ores et déjà été prises pour répondre à ces différents enjeux.
Depuis Février 2011, est lancé le label « Année 2011 » qui vise à valoriser des projets innovants en matière de promotion des droits des patients qu’ils soient menés au niveau régional ou national. Les projets labellisés sont mis en ligne sur le portail Internet crée pour l’occasion.
Dans le prolongement du label, une deuxième édition du concours « Droits des Usagers » a été lancé durant l’été une cérémonie de remise des prix sera présidée par Marina Carrère d’Encausse, médecin et journaliste, présidente de l’opération, le 15 décembre prochain.
Autant d’initiatives qui visent à mieux faire connaitre les droits existants et les voies de recours en cas de non-respect de leur application.
Le développement de l’information en santé sur internet, des nouveaux modes de prise en charge comme la télémédecine, l’éducation thérapeutique…., génèrent de nouvelles attentes de la part des « citoyens usagers » du système de santé. Le défi est de permettre cette évolution vers plus de responsabilisation et d’autonomie du patient, tout en préservant la qualité de la relation professionnels de santé/malades. Cette évolution ne pourra s’effectuer que dans le cadre d’une relation de confiance basée sur la transparence des informations délivrées et sur la prise en compte des préférences des patients… Un subtil équilibre que de nombreux professionnels de santé sont prêts à trouver, sous réserve d’en avoir acquis les compétences lors des études médicales, et d’en avoir les moyens dans le cadre de leur exercice quotidien.